
MARIE-CATHERINE CONTI JOUE SA VIE ! "QUAND MEME" Ah, la magie d'une rencontre entre une écrivain et une actrice ! Nos deux complices se sont unies pour faire entendre un même credo : "Ce qui est beau au théâtre, c'est la solitude partagée, la parole vivante." Là, sur une scène dépouillée, se présente une femme simple et exaltée, drôle et touchante. Elle ne nous lâchera plus de la soirée. Son nom ? Marie-Catherine Conti, celle qui avait envoûté son auditoire en 2003 avec Lettres de Toussainte de N. Fischer. Ce qu'elle nous balance, c'est tout simplement le plus limpide cri d'amour qu'on ait entendu, une réflexion aiguë sur un théâtre du verbe et du sens doublée d'une ode à la liberté de la femme. Offrant au spectateur un hypnotique monologue intérieur, elle développe le regard fractionné d'une femme taraudée par une passion tenace : pourquoi, comment a-t-elle choisi de faire du théâtre ? Quels rêves la portent ? Les siens ? Ceux d'un père, Leonardo, venu d'Italie avec son physique de cinéma ? La voilà qui nous déroule anecdotes et récits, captant la vérité brute de ce (difficile) métier, la magie chatoyante de l'enfance (une bâtisse près du Lac Majeur, une grand-mère qui parle du diable en riant, etc.), décrivant même le spectateur idéal, généreux de son attention, aux aguets des "signes que l'acteur fait". Bardée de récompenses, l'écrivain Danièle Sallenave ne cesse de nous épater par l'ambition sûre mais discrète de son propos, l'amplitude de son inspiration et la finesse de son tracé psychologique. Témoin : cette écriture lumineuse parsemée de phrases étoilées suspendues dans le temps comme la poussière dans la lumière. Et c'est là que l'entreprise passionne : non contente de partager avec le public ses théories sur l'art et la vie, l'un se nourrissant de l'autre, elle pointe les revers de l'"asservissement du collectif marchand", à savoir les soleils factices d'une société du spectacle calée dans le moelleux velours d'un système qui veut "faire des gens des forçats de la télé". Ciselé à plaisir, sans pose ni fioritures, ce texte irradie avec force, intensité et douceur. Difficile de ne pas être aimanté par le naturel frémissant de Marie-Catherine Conti (interprétation - conception), évoluant tour à tour dans le théâtre et hors de lui dans un décor de tubes rouges, au rythme d'une mise en scène sensible et sobre. On est joliment transporté et c'est ce qu'on attend du théâtre ! Myriem Hajoui
Commentaires